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Les articles de cette rubrique s’adressent à tous et n’ont d’autre ambition que de nourrir la réflexion et d’inciter à accomplir cet acte le plus audacieux de la liberté humaine qu’est la pensée philosophique. Portant sur quelques questions majeures qui se posent à l’homme et sur des thèmes divers, ils tracent des chemins que chacun peut emprunter afin d’en découvrir d’autres et de participer ainsi à la formidable aventure de la pensée.
Professeur de Philosophie, M. Carrel (photographié ici en 1910)
exerça dans notre établissement durant les années 1900-1920
(Collection Lycée Auguste-Chevalier)

Articles (21)

  • Le temps est-il essentiellement destructeur ?
    Quelle est l’essence du temps ? Qu’est-ce qui le constitue au plus intime exactement ? Est-ce la destruction ? Il est vrai que rien ne résiste au temps, que tout cède devant lui. Mais centrer la définition du temps sur la destruction, c’est oublier que le temps c’est aussi la vie et que rien ne se fait sans lui. Le temps présente en effet des facettes positives et ne voir en lui qu’une puissance destructrice serait l’aborder de manière réductrice. Comment alors définir la nature propre du temps si, tel un Janus, il présente deux visages diamétralement opposés ? Ne doit-on pas renoncer à concevoir son unité et la penser comme pleinement double ?
  • Notre rapport au monde est-il essentiellement technique ?
    Si l’être humain fait partie de la nature et lui est rattaché par de multiples liens, il a su au cours de son histoire agir sur elle et se soustraire progressivement à son emprise en transformant son environnement et en produisant un monde matériel fait d’objets artificiels de toutes sortes. Des premiers outils aux robots contemporains, la technique a partie liée avec cette dynamique d’arrachement de l’homme au monde naturel. Façonnant l’évolution de l’humanité, ses progrès ont permis de réaliser le projet dont Bacon et Descartes rêvaient à l’aube de la modernité et qui est désormais la modalité spécifique du rapport de l’homme à la nature, celui de sa maîtrise et de sa domination. Mais, paradoxalement, la puissance que l’être humain a conquise l’expose aujourd’hui à nombre d’impuissances et l’arrachement complet à la nature qu’il visait le reconduit, sous une forme certes très différente, à son attachement initial. Un basculement s’est en effet produit. Depuis plus de deux siècles, l’impact des activités humaines est tel qu’il a déclenché des mécanismes au long cours de dégradation de l’environnement dont la dynamique est si puissante qu’elle menace l’habitabilité même de la planète pour les êtres humains et pour les autres espèces, marquant l’entrée de la Terre dans ce que certains experts ont récemment proposé de nommer l’Anthropocène, littéralement « l’âge de l’homme », une nouvelle séquence de l’histoire terrestre où le degré d’incertitude quant à l’avenir du monde n’a jamais été aussi élevé. Une fois posé ce constat alarmant, il n’échappera à personne qu’il faille d’urgence redéfinir nos relations avec la nature, mais comment exactement ? Quelles issues trouver à la crise de la modernité suscitée par le basculement dans l’Anthropocène ?
  • Le travail n’est-il qu’une servitude ?
    Renvoyant étymologiquement à l’idée de torture et placé sous le signe d’une malédiction depuis que Dieu obligea Adam à travailler durement, le travail est souvent perçu comme une contrainte pénible privant l’homme de sa liberté. À cette vision négative s’oppose l’idée que le travail est un moyen d’expression et de réalisation de soi, un facteur d’émancipation et d’intégration, une activité permettant à l’homme d’accomplir son humanité en lui donnant l’occasion de déployer toutes ses facultés. Ne voir dans le travail qu’une servitude serait en effet en rester à une conception réductrice, mais il faut bien admettre qu’avec la logique qui gouverne l’économie depuis plus de deux siècles, celle de l’augmentation de la productivité et de la rentabilité, les méthodes d’organisation du travail mises en place ont fini par le défigurer, générant un profond mal-être chez un nombre croissant de travailleurs. Quelle voie prendre alors pour sortir de cette crise que traverse le travail, pour qu’il ne soit plus vécu comme une source de souffrance mais retrouve son sens et sa valeur ? Une transformation radicale de ses conditions d’exercice ne s’avère-t-elle pas nécessaire ?
  • L’histoire est-elle ce qui arrive à l’homme ou par l’homme ?
    Pour évidente qu’elle puisse paraître, l’idée que l’homme ait la capacité de produire l’histoire et de la gouverner librement est contestable car l’histoire se présente aussi comme le résultat de processus qui se déroulent sur le long terme, indépendamment de lui, et qu’il ne parvient pas à maîtriser. À la conception de l’homme comme sujet de l’histoire s’oppose ainsi celle de l’histoire comme processus sans sujet. Quel rôle l’homme joue-t-il alors exactement dans l’histoire ? A-t-il le pouvoir de la faire et de décider de son sens ou bien est-il voué à demeurer prisonnier de forces qui le dépassent et orientent seules le cours des événements ?
  • Douter, est-ce renoncer à la vérité ?
    Lorsque le doute surgit, l’incertitude prend le relais. Douter, c’est en effet s’apercevoir qu’on manque de certitude. Ce n’est pas se savoir dans l’erreur, mais ne pas être sûr de ce qui paraît vrai. Le doute peut ainsi conduire à une attitude résolument sceptique en invitant à penser qu’on ne peut jamais être certain d’avoir atteint la vérité. Mais le doute est-il vraiment un aveu d’échec pour celui qui cherche la vérité ? N’est-il pas au contraire un moment salutaire, l’éveil d’une raison qui s’efforce de progresser sur les longs et difficiles chemins de la connaissance ?